Nous irons aujourd'hui dans les bois, si tu veux.

Puisque juin nous ramène au pays ardennais,
Nous prendrons, à travers bruyères et genêts,
La sente, aux lents circuits, scintillant de rosée,
Qui se tortille au pied de la rampe boisée
Jusqu'à la métairie où l'on peut, sous l'ormel,
Déjeuner de lait pur, de pain bis et de miel

Veux-tu ? Nous leur ferons cette heureuse surprise,
Aux arbres, aux rochers, au soleil, à la brise.
A tous nos bons amis de la plaine et des bois,
D'aller nous installer chez eux comme autrefois.

Réveillée au reflet de ta beauté connue,
La source, tout d'abord, fêtera ta venue ;
Puis, du haut d'un sorbier, quelque merle indiscret
Sifflera la nouvelle à toute la forêt
Se hâtant aussitôt, bourdons et demoiselles
Nous feront des saluts de la tête et des ailes
Les papillons, prenant tes lèvres pour des fleurs,
Viendront à mes baisers joindre, en passant, les leurs,
Et, comme auparavant l'œil luisant des myrtilles
Nous sourira dans l'ombre, à travers les broutilles ;
Dans le même replis des verts bas-fonds herbeux,
Tintera le grelot des chèvres et des bœufs ;
Du creux noir des fourrés au bord clair des orées
Hysopes, thyms, lotiers, sauges et centaurées
Distilleront le même arôme au vent léger,
Car rien, là-bas, pas plus qu'en nous, n'a pu changer.


Adolphe HARDY